Votre sol est jonché de jouets de la chambre jusqu’à la cuisine en passant par la salle de bains ? Le rangement est l’occasion pour l’enfant d’investir pleinement son espace de vie et précisément son espace de jeu.
Comment l’avons-nous pensé ? Comment pourrions-nous l’aider à prendre de bons réflexes de rangement ? Que signifie ranger pour le tout-petit ? Sommes-nous condamné à lui rappeler sans cesse qu’il faut ranger ?
Autant de questions qui nécessitent d’être posées pour donner du sens à notre accompagnement, notre aménagement et peut être aussi ménager notre patience !
Licka Sarr, Formatrice Petite-Enfance et Accompagnante parentale, nous apporte des éléments de réponses 🙂
Comment apprendre le rangement aux enfants ?
Le rangement n’est pas inné
Nombreux sont les parents qui ont comme souvenir les demandes répétées et agacées de leurs propres parents pour qu’ils puissent « Ranger leur chambre !! ». Mais trop peu parmi eux gardent le souvenir d’avoir été accompagner et soutenus étape par étape dans cette tâche. En effet, il est courant de penser que ranger est innée et qu’il en tient de la logique pour les enfants. Or il découle d’un accompagnement et d’un raisonnement bien particulier.
Maria Montessori parle des périodes sensibles de l’enfant. Il y a notamment celle du langage, celle de la coordination des mouvements, celle des 5 sens et aussi celle de l’ordre. Cette dernière apparaît dès la naissance et tend à disparaître vers 6 ans. Il est donc recommander de mettre autant d’énergie que nécessaire sur ces premières années pour sensibiliser l’enfant dans le respect de ce qu’il ressent comme naturel. Je précise qu’il n’est pour autant jamais trop tard…
Le rangement comme habilité sociale
Le rangement est reconnu pour l’adulte comme une habileté sociale : « Il faut ranger avant de quitter une pièce », « Il faut remettre les choses où tu les as trouvé », « Il faut vite ranger, nous attendons des invités ». Autant d’injonction que les adultes s’imposent pour une vie en communauté respectueuse et en phase avec leur culture.
Le tout-petit n’est pas encore sensible à ces injonctions sociales. Ce sont certes des vérités pour nombreux d’entre nous mais en aucun cas cela ne pourra influencer de façon cohérente son développement et son attrait pour le rangement.
Le rangement comme respect pour soi et pour les autres
Impulser le rangement avec une notion de respect et de responsabilité est souvent mieux compris et bien accueilli par l’enfant.
« Rangeons pour garder un espace de jeu facile à utiliser. », « Rangeons pour trouver plus facilement ce que l’on cherche la prochaine fois » « Rangeons pour permettre à celui qui passe ensuite d’être content de trouver le jeu rangé ». Voici quelques arguments qui aident l’enfant à mettre du sens dans cette action qui doit rester le plus possible agréable et utile pour lui. Je précise tout de même que le tout-petit bien ancré à l’instant présent aura certainement du mal à comprendre et faire du lien entre une action immédiate et une conséquence ultérieure ; Cela commence alors par admettre avec lui qu’il est bien agréable de jouer dans un espace de jeu clair, du matériel disponible et bien rangé.
Le rangement comme démarche scientifique
Il est nécessaire pour rentrer dans une démarche scientifique d’accompagner son enfant à identifier le sens de l’ordre (chaque chose à sa place) sans qu’il ne le confonde avec l’apparence ordonnée qui consisterait par exemple à tout cacher (là où il reste de la place) pour donner juste l’apparence d’un espace ranger.
Quand l’enfant commence à apprécier que chaque chose à une place et qu’il est précieux de l’y remettre pour la retrouver plus facilement, il commence à créer une logique qui est la même utilisée pour le développement du sens de l’organisation, de la gestion de projet et tout simplement pour la classification, la hiérarchisation de ses idées.
Le rangement, ça s’organise
Pour rendre le rangement possible, et ce quel que soit l’âge, il est impératif de proposer du mobilier adapté, à la taille de l’enfant et simple d’utilisation. On préférera les boites légères et solides. Les contenants multiples afin de catégoriser au plus les choses à ranger.
Idéalement, on identifie chaque boite ou étagère avec la photo de ce qui doit y être rangé.
Il est également important de penser le temps de rangement dans le temps de jeu, en évitant de le presser, comme si le temps n’avait plus la même mesure après le jeu.
Prévoyez une boite des jeux ou objets non classés. Cela évitera que l’enfant soit tenter de mettre un objet à une place qui n’est pas la sienne et ça permettra ensuite d’identifier les manques et de créer de nouveaux rangement ou classifications.
Le rangement selon les âges
En fonction de son âge, l’enfant est plus ou moins autonome face au rangement. Voici quelques indications qui peuvent varier d’un enfant à l’autre. L’idée est de ne pas braquer l’enfant et de l’aider sans faire absolument à sa place au point qu’il n’en trouve plus l’utilité.
De 1 à 2 ans : Il s’agit de toutes petites missions « Peux-tu ranger cette peluche dans le coffre vert, s’il te plaît ? », « Peux-tu mettre le verre dans l’évier ? ». Ces dernières sont précises et simples. Il sera aisé ensuite de valoriser sa collaboration et l’encourager dans cette démarche. Elles peuvent-être ritualisées (en donnant les mêmes tâches au même moment de la journée), ainsi avec le temps, la consigne disparaitra et l’acte de ranger deviendra rassurant pour l’enfant.
De 2 à 3 ans : En gardant et renforçant l’idée de ritualiser de façon ludique, nous pouvons augmenter les occasion de ranger. (ex : toujours ranger sur une même chanson. Faire la course pour mettre les choses à leur place. Poser des devinettes)
A cet âge l’enfant peut commencer à trier et ranger dans des boites.
Période d’affirmation : montrer à l’enfant que le rangement est au moins important pour vous. Proposer sans le braquer, puis s’il ne veut vraiment pas, ranger en lui montrant que la tâche doit être faite et que vous lui faite confiance sur le fait qu’il comprendra avec le temps.
De 3 à 4 ans : L’adulte peut être plus en retrait. Parler des avantages vus plus haut « Le rangement comme respect pour soi et pour les autres »
Il commence à ranger des boites dans un meuble.
Après 5 ans : Prendre du recul tout en gardant une présence soutenante. Celle-ci est particulièrement importante quand la salle à ranger semble ne pas avoir survécu à une apocalypse
A cet âge, il peut commencer créer ses propres rangements en expérimentant. Il est important de ne pas imposer sa vision et de discuter avec lui du lien entre son objectif de rangement et le résultat.
Lâcher-prise sur le rangement
Acceptons qu’il peut parfois y avoir du désordre.
Ce n’est pas simple, mais admettons qu’une salle qui peut nous sembler encombrée et dérangée peut aussi être vue comme un incroyable terrain de jeu riche de propositions pour l’enfant.
Peut-être qu’il sera rassurant pour un enfant, le temps d’un week-end, de ne pas à avoir ranger la scène de Playmobil crée près du coin voiture ou de ne pas défaire le drap suspendu entre le bac à peluches et l’armoire de jeu pour la retrouver au réveil…
Lacher-prise sur le rangement c’est aussi laisser l’enfant se créer sa propre motivation à ranger son espace de vie. Afin de ne pas risquer que cette envie d’ordre ne soit relier à la seule crainte de se faire disputer ou reprendre par son parent. Que le rangement soit seulement fait pour faire plaisir à l’autre.
A l’heure où de nombreux coach en rangement proposent leurs services, nous pouvons penser que beaucoup d’adultes ne soient pas à l’aise avec leur conception de l’ordre. Et pour vous le rangement, est-il un jeu d’enfant ?
Livres pour aborder le rangement avec l’enfant :
Jeanne ASHBÉ. – Lou et Mouf : Faut tout ranger ! – L’école des loisirs
Eve Herrmann et Roberta Rocchi. – On range ! – Nathan
Oriane Lallemand et Eléonore Thuillier. – P’tit Lou ne veut pas ranger – Editions Auzou Philippe
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